La mise en place d'un fonds monétaire européen (FME), si elle permettrait de combler un vide dans l'organisation de l'Union économique et monétaire, pose aussi de très nombreuses questions, techniques, juridiques et politiques.
A quoi servirait le Fonds monétaire européen ?
La réponse à cette première question n'est pas clairement établie. Pour le gouvernement allemand, à l'origine de cette proposition, ce fonds doit fournir des aides financières à un pays de la zone euro en difficulté financière, mais il doit aussi, et surtout, organiser une stricte discipline économique et budgétaire, doublée de sanctions, comme l'a répété hier la chancelière Angela Merkel. Le Pacte de stabilité et de croissance, qui avait pour objectif d'empêcher la dérive des finances publiques des pays européens, a clairement failli et Berlin veut tirer les leçons de cet échec. Il s'agit de faire face « aux situations ultimes » pour « empêcher de manière ordonnée une faillite d'un Etat », a indiqué hier Angela Merkel. D'autres pays, comme la France, retiennent davantage la fonction de prêteur et mettent beaucoup moins l'accent sur les sanctions.
Comment le FME s'articulerait-il avec le FMI ?
Les leaders politiques du G20 ont plus que triplé, le 2 avril 2009, les ressources du Fonds, à plus de 1.000 milliards de dollars, pour venir en aide aux pays éprouvant des difficultés de financement de leur balance des paiements. A quoi serviront ces capitaux si les Européens décident d'exclure toute intrusion du FMI dans un pays membre de la zone euro au profit du FME ? Les deux organismes n'ont pas la même mission, notent les experts. A la différence du FMI, qui intervient en cas de difficultés de financement de la balance des paiements - ce qui n'est pas le cas de la Grèce -, le FME aurait pour vocation d'aider un Etat membre de la zone euro éprouvant des difficultés budgétaires et faisant face à la défiance des marchés financiers. Il reste que les pays asiatiques, d'Amérique latine et maintenant d'Afrique ont tous pris des initiatives plus ou moins similaires visant à moins dépendre de l'institution multilatérale basée à Washington (voir ci-dessous). Cette volonté d'émancipation peut-elle à terme signer l'arrêt de mort du Fonds, qui en serait réduit à n'intervenir que dans des pays secondaires ?
Qui financerait le FME ?
Si le FMI est financé par des transferts de fonds des banques centrales nationales de ses membres, le FME recourrait plutôt à un emprunt sur les marchés financiers. C'est en tout cas ce que suggèrent les deux auteurs à l'origine d'une étude-plaidoyer en faveur d'un fonds européen, Daniel Gros, du think tank CEPS, et Thomas Meyer, de la Deutsche Bank. Le fonds serait aussi abondé par les contributions des Etats membres qui ne respectent pas les critères du traité de Maastricht en termes d'endettement et de déficit public. S'ils avaient existé, ces prélèvements effectués auprès des moins vertueux des pays membres de la zone euro auraient permis d'accumuler, en dix ans, 120 milliards d'euros, ont calculé ces chercheurs, largement de quoi venir en aide à la Grèce.
Sur quelle base juridique créer ce fonds ?
Pour les Allemands, il ne fait pas de doute qu'il faudra négocier à vingt-sept la modification des traités existants. Ne serait-ce que parce que ceux-ci interdisent tout sauvetage d'un pays de la zone euro par ses partenaires ou par la Banque centrale européenne. Mais, comme l'a répété Angela Merkel, le contexte de la crise financière a changé la donne et elle juge désormais nécessaire de prévoir un système de soutien. La France ne voit pas d'un très bon oeil l'idée de rouvrir une négociation institutionnelle tant la dernière lui a paru longue et périlleuse. Certains juristes prétendent que l'on pourrait utiliser le traité de Lisbonne pour créer une « coopération renforcée » entre pays de la zone euro. Mais cette solution laisse entier le problème de compatibilité avec le traité, qui interdit le sauvetage d'un pays de la zone euro.
Le FME a-t-il une chance de voir le jour ?
Oui, si Paris et Berlin parviennent à trouver un compromis entre la vision allemande d'un fonds uniquement gendarme de la zone euro et l'approche française, orientée davantage sur la solidarité inhérente à une union monétaire.
CATHERINE CHATIGNOUX ET RICHARD HIAULT, Les Echos
Κυριακή 14 Μαρτίου 2010
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